La systémie et la roue des privilèges en lien avec la Communication Non Violente (CNV)

1. Qu’est-ce que la systémie ?

La systémie est une approche qui considère les individus non pas isolément, mais comme des éléments d’un système (famille, entreprise, société…). Chaque personne est influencée par des interactions, des règles implicites et des structures de pouvoir.

2. La roue des privilèges : un prisme systémique

La roue des privilèges est un outil qui met en lumière les avantages et désavantages structurels liés à des critères comme :

• Le genre 

• L’origine ethnique

• La classe sociale

• L’orientation sexuelle

• Le handicap

• Le pays d’origine

• Les capacités physiques 

• L’accès à l’éducation

etc.

Elle montre que certains individus bénéficient de privilèges souvent invisibles pour eux qui leur permettent d’avoir accès à plus de ressources et donc ont plus de possibilités de nourrir leur besoin, tandis que d’autres ont un accès imité à ces mêmes ressources et peuvent subir des oppressions systémiques.

3. CNV et roue des privilèges : un enjeu systémique

La Communication Non Violente (CNV), créée par Marshall Rosenberg, repose sur l’écoute empathique et l’expression authentique des besoins. Cependant, sans mettre de la conscience sur les rapports de pouvoir issus de ces privilèges, elle peut ne pas aboutir à la même écoute profonde des besoins réciproques 

4. Exemple de conflit entre un homme et une femme : approche systémique et roue des privilèges

Contexte du conflit : Sophie et Marc sont en couple depuis plusieurs années. Sophie ressent une grande charge mentale dans la gestion du foyer et en parle souvent à Marc. Ce dernier se sent critiqué et estime qu’il participe déjà aux tâches. Lorsqu’elle lui dit :

“J’ai l’impression de tout gérer à la maison et que tu ne vois même pas ce que je fais.”

Marc répond :

“Mais ce n’est pas vrai, je t’aide beaucoup ! Tu exagères.”

Ils finissent par se disputer, chacun se sentant incompris et frustré.

– Approche classique : un conflit perçu de manière individuelle

Si on reste dans une vision non systémique, on peut voir ce conflit comme une simple incompréhension entre deux individus :

• Sophie exprime une frustration (charge mentale).

• Marc se sent injustement accusé et réagit en se défendant.

Une approche classique de la Communication Non Violente (CNV) pourrait consister à reformuler les besoins et sentiments de chacun :

• Sophie : “Quand je vois que je dois penser à tout à la maison, je ressens de la fatigue et du découragement, car j’ai besoin de soutien.”

• Marc : “Quand tu dis que je ne fais rien, je ressens de l’injustice, car j’ai besoin de reconnaissance pour ce que je fais.”

Cela peut déjà améliorer le dialogue, mais cela reste limité si on ne prend pas en compte les mécanismes systémiques sous-jacents.

 – Apport de l’approche systémique et de la roue des privilèges

a) Vision systémique : comprendre le contexte global

La charge mentale n’est pas qu’un simple désaccord dans un couple, c’est un phénomène sociétal où les femmes, historiquement, ont été socialisées pour gérer l’organisation du foyer, tandis que les hommes ont souvent été encouragés à voir leur participation comme une “aide” plutôt qu’une responsabilité partagée.

Si Marc réagit en se défendant, ce n’est pas uniquement parce qu’il se sent attaqué, mais aussi parce qu’il ne perçoit pas le travail invisible que fait Sophie (anticiper les courses, gérer les rendez-vous des enfants, penser aux tâches ménagères, etc.).

L’approche systémique permet alors de poser des questions comme :

• Quels rôles chacun a appris inconsciemment à travers son éducation ?

• Comment le couple peut-il rééquilibrer la répartition des responsabilités de manière durable ?

b) La roue des privilèges : prise de conscience des inégalités structurelles

Dans la répartition des tâches domestiques, Marc bénéficie d’un privilège structurel : il a le choix d’aider ou non, alors que Sophie, elle, n’a pas d’autre option que d’assumer si lui ne le fait pas.

Une prise de conscience par Marc de ce déséquilibre structurel pourrait permettre un dialogue plus productif. Plutôt que de rester sur une vision individuelle (“Je fais déjà des efforts”), il pourrait comprendre que la charge mentale n’est pas une simple question de répartition des tâches, mais aussi une question de responsabilisation et de rééquilibrage du pouvoir dans le couple.

– Comment la systémie et la CNV peuvent aider à sortir du conflit ?

Plutôt que de rester dans une posture de défense, Marc pourrait adopter une écoute active et systémique :

“Je réalise que tu portes une charge mentale que je n’ai pas forcément perçue. Peux-tu me dire quels sont les aspects qui te pèsent le plus, et comment on pourrait mieux les répartir ?”

De son côté, Sophie, en comprenant que Marc ne voit pas forcément ce qu’elle gère au quotidien (parce qu’il n’a pas été éduqué à le voir), peut l’inviter à une prise de conscience sans être dans le reproche :

“Ce que je ressens, ce n’est pas juste un manque d’aide, c’est que j’ai toujours l’impression d’être la seule à penser à ces choses. Ce serait un soulagement si on pouvait réfléchir ensemble à une meilleure répartition, pour que je n’aie pas à toujours devoir demander.”

– Résolution : une transformation du système plutôt qu’un simple compromis

Grâce à cette approche, le couple ne cherche pas juste un compromis temporaire, mais une transformation du mode de fonctionnement :

• Visibiliser la charge mentale : Par exemple, en listant tout ce qui est à gérer dans le foyer pour mieux répartir les responsabilités.

• Co-responsabilisation : Plutôt que d’attendre d’être sollicité, Marc pourrait anticiper lui-même certaines tâches.

• Évolution des rôles : Travailler sur une répartition qui ne repose pas uniquement sur des habitudes genrées mais sur des besoins équitables.

5. Vers une CNV plus consciente des systèmes 

Ce conflit, au premier abord individuel, prend une tout autre dimension quand on le regarde sous l’angle systémique et de la roue des privilèges. La CNV, enrichie par cette approche, ne se limite pas à une meilleure compréhension mutuelle, mais permet aussi d’interroger les mécanismes invisibles d’inégalités et de modifier les dynamiques du couple de façon durable.

Ainsi, les enjeux sont les suivants : 

• Adapter la CNV selon les rapports de pouvoir : On ne communique pas de la même manière selon qu’on est privilégié ou non dans une interaction.

• Écoute active des oppressions systémiques : Être conscient que certaines personnes ont plus de mal à exprimer ou à nourrir leurs besoins à cause de leur place dans la société.

• Engagement dans la transformation des systèmes : La CNV ne doit pas juste fluidifier la communication, mais aussi questionner et modifier les structures injustes.

Conclusion

En intégrant la roue des privilèges dans la systémie et la CNV, on dépasse une approche individuelle des conflits et on agit sur les inégalités structurelles. Cela permet une communication plus juste, qui ne se contente pas d’harmoniser les relations, mais cherche aussi à rééquilibrer les rapports de force.

Compilé sur internet par Fanny Raess dans le parcours de certification CNV

avec l’aide de ChatGPT