La Systémie au service de notre pratique de la CNV

Relever le regard pour capter ce que nous renseignent les plans invisibles

Dans un monde en constante évolution, apprendre à mieux communiquer est essentiel pour bâtir des relations harmonieuses et résoudre les tensions qui émergent inévitablement dans nos interactions. Ça ce n’est pas nouveau et la plupart de nous, lecteurs et lectrices, en sommes convaincu.es.  Trop souvent, nous abordons la communication sous un prisme purement interpersonnel, cherchant à améliorer nos échanges avec les autres en omettant la grille de lecture des dimensions plus vastes qui influencent ces relations. 

La Communication NonViolente (CNV) est pourtant une approche systémique qui nous invite à élargir notre regard et notre écoute profonde. Nous sommes conscients que nos interactions ne sont pas seulement le fruit de nos émotions et de nos intentions du moment, mais elles s’inscrivent dans un contexte plus large, fait de culture, d’histoire et d’environnement.

Étant le fruit de deux cultures très différentes (indienne et européenne), j’ai été forcée de comprendre que les enjeux relationnels ne se limitaient pas simplement à “papa et maman”, mais à tout ce qu’ils emportaient avec eux : leur éducation, leurs valeurs, leurs croyances, leurs blessures et tout un héritage invisible et profondément présent dans leurs façons d’être au monde et d’interagir. Cette prise de conscience m’a permis de voir que les tensions ne naissent pas uniquement des individus, mais aussi de tout un contexte qui les précède et les dépasse.

C’est fascinant de constater à quel point notre passé, notre culture et notre histoire nous accompagnent dans toutes nos interactions – et, en même temps, c’est tout aussi fascinant de voir à quel point on oublie d’en tenir compte. Comme si on était constamment le nez dans le guidon, tentant d’harmoniser les choses à court terme, en oubliant de relever le regard pour appréhender cette autre dimension qui, pourtant, fait partie intégrante de nous. Nous nous concentrons sur les mots, les réactions immédiates, sans toujours prendre la mesure du poids des héritages que nous transportons et qui influencent nos échanges.

La CNV nous apprend à écouter avec empathie, à exprimer nos besoins et à poser des actes ou faire des demandes qui vont dans le sens de ce que nous cherchons. Marshall Rosenberg voyait la CNV comme un outil puissant au service d’un changement bien plus large que les relations interpersonnelles : un véritable levier de transformation sociale. Et ce changement ne peut advenir que si nous élargissons notre regard, en prenant en compte toutes les dimensions de notre être et des plans invisibles.

 Son processus nous pousse à comprendre que les tensions relationnelles sont souvent des symptômes d’un système plus vaste. Un conflit au sein d’une équipe peut être lié à des dynamiques de pouvoir ancrées dans l’histoire de l’organisation, à des non-dits accumulés, ou encore à une culture d’entreprise qui valorise la compétition plutôt que la coopération. De même, dans une famille, des incompréhensions répétées peuvent être le reflet de schémas transmis sur plusieurs générations.

Si nous pouvions aborder nos conflits – et plus largement toute notre communication – sous cet angle, je suis persuadé·e que nous pourrions nous épargner bien des blessures, que ce soit sur l’ego ou sur notre propre valeur. En comprenant que nos désaccords sont souvent le reflet de systèmes plus vastes, nous pourrions cesser de nous enfermer dans des luttes de pouvoir et commencer à construire des relations plus conscientes et apaisées.

À mon sens, une communication profonde ne peut se limiter aux mots échangés entre deux personnes ; elle implique aussi d’écouter ce qui se joue en arrière-plan, d’entendre l’histoire qui s’exprime à travers les tensions et de reconnaître l’influence des structures qui nous entourent. En intégrant cette perspective, nous transformons notre manière d’être en relation et ouvrons la voie à une compréhension plus globale et plus juste de nos interactions.

En conclusion, la Communication NonViolente (CNV), lorsqu’elle est comprise sur plusieurs plans, devient véritablement l’outil de changement social que Marshall Rosenberg nous invite à pratiquer. Elle nous engage dans une triple relation : à nous-mêmes, à travers un contact profond avec nos besoins ; à l’autre, en reconnaissant et en écoutant ses besoins ; et enfin, à une dimension plus vaste, celle de notre histoire, de notre culture et de tout ce que nous transportons inconsciemment. C’est en embrassant ces différentes dimensions que nous pouvons mettre la CNV au service de la paix et d’un changement plus grand que nous.

Pour explorer la CNV sous l’angle systémique spécifiquement, des collègues de notre réseau CNV proposent des ateliers et des formations : Catherine Brunelle, Sophie Lewandowski en France, et Léontine Keijzer Gango, du Burkina Faso, et moi-même. 

Je vous souhaite une bonne exploration de cet outil puissant, en espérant qu’il vous inspire et vous accompagne dans vos propres cheminements vers la paix intérieure et sociale.

Farrah Carlier

Formatrice en Communication NonViolente certifiée du CNVC

CNVC Certified Trainer (www.cnvc.org)

Giraffarrah Fomations : Organisme de formation professionnelle continue www.giraffarrah.eu

Stage “vivre la CNV sous l’angle de  l’interculturalité”, les 23, 24 et 25 mai 2025, coanimé par Léontine Keijzer Gango et Farrah Carlier. Pour plus d’infos et s’inscrire, allez sur le site de Giraffarrah Formations → c’est par ici : https://docs.google.com/forms/u/0/d/e/1FAIpQLSfCFnV4XwsjGxy1rNM6V9LRac2YLjzcx7Zxo96Yrwro4B11cQ/viewform?usp=send_form&pli=1