Comment en suis-je venu à proposer des stages CNV à distance ? Une interview de Paul-Georges Crismer

Paul-Georges Crismer, durant le confinement tu as proposé des stages CNV à distance. Comment l’idée t’est-elle venue ?

Déjà j’étais riche de ma participation, il y a quelques mois, à un stage à distance proposé par une collègue américaine.  J’avais apprécié à la fois le contenu et la méthode.  Très inspiré par cette série de 6 ateliers je m’étais dit « ça c’est une formule à proposer »… et puis la vie a continué.

Au début du confinement j’ai été profondément touché de voir la tension et le désarroi des personnes avec lesquelles j’étais en contact. 

Mon premier réflexe a été de publier un message sur Facebook en proposant des temps d’écoute empathique pour soutenir les soignants et les personnes touchées par la solitude.

Au fond de moi, une conviction : j’ai les ressources, avec la CNV, de vivre ce temps comme un moment formidable.  Se rencontrer en chair et en os n’est qu’un moyen pour se relier les uns aux autres.  Même : nous vivons une époque formidable où nous pouvons converser et nous réunir à distance grâce à la technique.

C’est donc tout naturellement, et riche de l’expérience avec ma collègue américaine, que j’ai proposé aux participants du stage « Gérer les personnalités difficiles » de nous rencontrer de manière virtuelle. C’est comme ça que ça a démarré.  Certains participants ont suivi, d’autres pas, d’autres se sont joints au groupe.

Ensuite j’ai proposé d’autres choses :

  • Des cercles d’empathie
  • Des groupes de pratique CNV
  • Des stages d’approfondissement sur l’empathie et l’auto-empathie, des ressources que je considérais comme essentielles pour travers cette période.

J’ai fait le choix de ne proposer que des stages d’approfondissement de la CNV.  En effet je ne voyais pas comment faire goûter à distance à l’aspect « corporel » de la CNV

Quels succès et difficultés as-tu rencontrés ?

J’ai proposé des stages en 6 séances de 1h30 à 2h30, espacées de plusieurs jours. 

Une des difficultés ce fut la gestion du temps : 

  • Comme animateur le temps ne s’écoule pas tout à fait de la même manière en présentiel qu’en distanciel : notamment dans la gestion des tours de parole en grand groupe.
  • A chaque séance j’avais envie que les participants repartent avec quelque chose.  En présentiel on peut déborder sur la séquence suivante.  Avec la formule que j’avais choisie cela devenait un petit défi – ou une invitation au lâcher prise.

Le plus grand succès c’est d’entendre les participants se réjouir de la qualité et de la profondeur des échanges.  C’est de voir combien il est possible de vivre des choses ensemble par delà les distances.

Un autre succès c’est de rendre les stages accessibles à des personnes qui habitent loin et qui n’auraient jamais participé autrement (disponibilité, surcoût pour transport/logement).

Comment as-tu vécu cela sur le plan humain ?

Sur le plan humain ce fut une expérience très riche.  Quand j’y repense mon cœur s’attendrit.  J’ai pu contribuer, partager, célébrer la vie, expérimenter de l’intensité… Apprendre beaucoup également.

Je pense notamment à la proposition que j’avais fait que les participants s’entraînent en duo, en dehors du temps de formation.  Ensuite grosse partie de séance a été consacrée aux retours d’expérience.  Quelle richesse !  J’ai appris au même titre que les autres.  C’est bon de vivre ce co-apprentissage, et ça me donne envie d’accentuer cet aspect dans les stages.

Plus que jamais j’ai pu faire l’expérience que la connexion résulte de l’élan de chacun à se rejoindre – même par ordinateur interposé.

Vois-tu des points à améliorer ?

A chaque stage les participants partagent ce qu’ils ont apprécié et ce qu’ils ont moins apprécié.  Avec les formations à distance j’ai été avide des retours des participants. 

Par exemple certains apprécient les conversations « à côté », celles qu’on prend lors des pauses café ou des repas.  Comment répondre à ces besoins de connexion dans un stage à distance ? Par exemple en proposant des duos ou trio d’exercice, en dehors des temps d’animation.

D’autres aiment faire un usage efficace de leur temps et donc démarrer à l’heure et éviter les papotages de début.  Cela me donne l’idée de proposer l’ouverture de la salle de réunion ¼ h avant afin que les participants arrivent tranquillement et puissent papoter s’ils le souhaitent, pour ensuite démarrer à l’heure.

J’ai confiance que les participants d’autres stages m’apporteront encore de nouvelles idées d’amélioration.

Aurais-tu des conseils à donner à des collègues qui désireraient se lancer ?

Surtout ne pas le faire si on ne le sent pas. 

Ne le proposer que si on est à l’aise avec les moyens techniques.  Prendre le temps de se familiariser pour se lancer quand c’est fluide.

Connaître et accepter les limites de cette formule : le distanciel répond à toute une série de besoins.  Il ne peut répondre à d’autres que le présentiel honore.

Prendre ça comme un jeu : viser l’amusement, l’exploration, l’expérimentation.  Et être clair là-dessus avec les participants.

Gratitude

Merci à l’équipe ACNV-BF de m’avoir invité à partager le fruit de cette expérience.
Personnellement cela me donne des idées et l’élan de proposer à l’association d’organiser des conférences interactives en mode virtuel.  Pour le rayonnement de l’association et pour contribuer à la Paix.